Se réformer sans cesse

Se réformer sans cesse

Le premier principe qui inspire tout le protestantisme est celui qui pose la seule autorité de l’Eglise : « Sola Scriptura« , c’est à dire par l’autorité de l’écriture

L’autorité de la seule Écriture signifie qu’elle fournit l’instrument qui permet de peser, de mesurer et d’apprécier ce que l’on reçoit d’ailleurs; elle ne veut pas dire qu’on ait à ignorer, à rejeter ou à condamner ce qui ne vient pas d’elle (A. Gounelle).

Un autre principe fondateur considère que l’homme ne peut, par sa raison ou son esprit, reconnaître la vérité. Il doit pour cela être éclairé par Dieu lui-même : « Testimonium Spiritus sancti« . La compréhension des Écritures est le fruit du renouvellement de l’intelligence par le Saint Esprit et du libre examen (l’honnêteté intellectuelle).

Ainsi, les églises évangéliques qui posent comme base une foi dont la raison est première ont une position bien compliquée à défendre.

Les églises de la Réforme ont dès le 17e siècle, exigé de demeurer une Eglise “ecclesia reformata quia semper reformanda » c’est à dire se réformant sans cesse.

Hélas cela reste un vœux pieux : les témoignages sur les blessés et cassés du fonctionnement évangélique actuel s’accumulent et leur accompagnement devient un ministère spécialisé.

Contrairement aux idées reçues, ceux qui témoignent sont en fait de plus en souvent des chrétiens matures et engagés ayant eu des responsabilités en église et ne supportant plus le décalage avec l’amour du Christ.

Ainsi, dans le magazine « Christianisme aujourd’hui » de février 2007 sur la foi hors église ,le dossier s’ouvre sur la constatation suivante, a partir des travaux doctorants du pasteur neo-zélandais  Alain Jamieson.

Un aspirateur géant donc le sac serait troué. C’est ainsi que le chercheur Alan Jamieson décrit le milieu évangélique, déployant son énergie dans le recrutement de nouveaux membres alors qu’il en perd nombre d’autres….

Ce qui est nouveau est particulier, c’est que, dans un certain nombre de cas, ceux qui quittent une église professante le font fermement décidés à rester attachés à leur foi et à continuer à la vivre hors cadre ecclésial.

Les sociologues se sont penchés sur ce phénomène, en particulier dans le monde anglo-saxon .

D’après eux , la tendance va se poursuivre et constituer un défi pour l’Eglise évangélique du XXI eme siècle

Un mouvement de fond est apparu aux Etats-Unis, mené par le bloggeur évangélique  Frank Viola ( son blog Beyond Evangelical  est classé dans le top 10 des blogs évangéliques les plus influents).

Il prône le retour aux églises primitives ( donc églises de maison) sur base scripturaire.

Voilà ce qu’il écrit au début de son livre à succès Reimaginer l’église

Le célèbre enseignant Martyn Lloyd-Jones dit un jour:

-« Nous vivons dans un âge désespérément en-dessous du modèle du Nouveau Testament, en étant satisfaits de notre douillette petite religion.«

Avec cette pensée à l’esprit, je voudrais commencer notre discussion sur les pratiques de l’Eglise du Nouveau Testament en examinant pourquoi les chrétiens de l’église primitive se réunissaient.

Notez que lorsque j’emploie le terme « réunion d’église » je l’utilise dans un sens restreint.

La Bible dresse le portrait de nombreuses et différentes sortes de réunions durant lesquelles les premiers chrétiens se rassemblaient (réunions de prière, évangélisations, enseignement, réunions apostoliques, conseils d’église, etc.).

Par « réunion « , je me réfère explicitement au rassemblement spécial de l’assemblée locale, décrit dans I Corinthiens 11-14. En accord avec les Écritures, et également avec la tradition, cette rencontre semble s’être déroulée le premier jour de la semaine (Actes 20:7).

Avant que nous explorions le but de la réunion d’église du Nouveau Testament, examinons premièrement pourquoi la plupart des chrétiens aujourd’hui se rassemblent « à l’église » . Il y a principalement quatre raisons:

1) l’adoration,

2) l’évangélisation,

3) entendre une prédication, ou

4) la communion fraternelle.

Aussi curieux que cela puisse paraître, le Nouveau Testament n’envisage jamais aucune de ces raisons comme but central des premiers rassemblements.

La place de l’adoration, de l’évangélisation, de la prédication et de la communion fraternelle;

Selon le Nouveau Testament, l’adoration est quelque chose que nous vivons. C’est dorénavant la manifestation de notre reconnaissance, notre affection, notre dévouement, et le sacrifice d’obéissance dont Dieu est Digne a chaque instant de notre vie (Matthieu 2:11, Romains 12:1, Philippiens 3:3).

Par conséquent, lorsque nous nous rassemblons en tant que peuple de Dieu, nous devrions venir dans un état d’esprit d’adoration.

Le temple de l’Ancien Testament est la figure clé pour cet aspect de la réunion, car l’extraordinaire particularité du temple était l’adoration.

Cependant dans la pensée de beaucoup de chrétiens d’aujourd’hui, l’adoration est limitée à chanter des cantiques, des hymnes et des louanges. Et bien qu’adorer Dieu par des chants fut un aspect très important de la rencontre alors (Ephésiens 5:19, Colossiens 3:16), la Bible ne le présente pas comme thème principal.

De la même façon, la Bible n’assimile jamais l’annonce de l’Evangile au but de la réunion des croyants.

Au contraire, le Nouveau Testament démontre clairement cela se déroulait communément en dehors du rassemblement des croyants.

J’appelle de telles réunions, des « évangélisations » et d’ordinaire elles se tenaient dans des lieux fréquentés par des non-croyants, c’est-à-dire dans les synagogues et sur les places publiques (marchés).

Au contraire, les rencontres du Nouveau Testament étaient principalement destinées aux croyants. Le contexte de I Corinthiens 11-14 confirme cela de façon tout a fait évidente. Bien que des « non-régénérés » furent parfois présents, la réunion ne se focalisait pas sur eux. (dans I Corinthiens 14: 23-25, Paul mentionne furtivement la présence hypothétique de non-croyants à la réunion.)

En outre, l’idée répandue que la réunion hebdomadaire était motivée par l’intérêt d’entendre une prédication est sans fondement biblique.

Bien que le « ministère de la Parole » fut certainement présent dans les réunions primitives (I Corinthiens 14 parle de ceux qui enseignaient des doctrines, donnaient des révélations et des prophéties), entendre un « sermon » n’en était pas la caractéristique principale.

En considérant cela, les réunions de l’Église primitive étaient nettement différentes du typique service (culte) institutionnel dont la chaire (estrade) focalise l’attention,

où tout converge et est basé sur le sermon,

et où la congrégation (les personnes pré- sentes) évalue la réunion à la qualité du message (apporté par le prédicateur).

Une lecture attentive des textes bibliques nous conduira a là surprenante réalité que l’idée d’une réunion centrée sur le sermon, d’une église focalisée sur l’estrade (la chaire) n’est en aucun cas soutenue par le Nouveau Testament.

Bien qu’il soit vrai qu’en certaines occasions dans le livre des Actes nous trouvions les apôtres exerçant le ministère de la Parole longuement, de tels rassemblements n’étaient pas des « réunions d’église ».

C’était plutôt des rencontres « apostoliques » durant lesquelles les apôtres prêchaient à des auditeurs lorsqu’ils étaient courtement de passage dans une ville ou qu’ils fondaient une nouvelle église.

Cela pourrait s’apparenter à un apôtre d’aujourd’hui, enseignant ou prophète, exerçant ses dons, et exceptionnellement durant un séminaire ou une conférence.

Ces réunions « de ministère’ (où l’on vient recevoir l’enseignement, la prophétie…) ne doivent pas être confondues avec les « réunions d’église ».

Dans un premier temps, un ministère apostolique charismatique est exercé envers un auditoire passif pour l’équiper au service ; afin que, par la suite, chaque membre exerce librement ses dons « reçus ».

Par conséquent, l’enseignement de la Parole était simplement un des thèmes de la réunion. Ce n’était pas le but central.

De plus, l’enseignement n’était pas donné par la même personne chaque semaine comme cela est la coutume dans la plupart des églises traditionnelles.

Enfin, la communion fraternelle n’était pas non plus la but principal des réunions primitives.

Bien que celle-ci fasse partie intégrante de la vie « du Corps », elle n’a jamais constitué la principale raison du rassemblement des croyants. La communion fraternelle, ainsi que les prières, la fraction du pain, et l’enseignement des apôtres, se développe simplement lorsque le peuple de Dieu dans la joie commence a rendre gloire au Seigneur Jésus et permet au Saint Esprit de diriger leurs rassemblements (Actes 2:42).

Finalement, bien que ces quatre activités soient nécessaires a la vie de l’église, aucune d’entre elles ne peut à juste titre être retenue comme le but ultime de la réunion « d’église ».

L’exhortation et l’édification mutuelle

Si le but de la réunion, comme décrite dans le Nouveau Testament, n’était ni l’adoration, ni l’évangélisation, ni la prédication,ni la communion fraternelle, quel était-il donc?

Selon les Ecritures, les croyants se rassemblaient en vue de l’édification mutuelle et de l’exhortation. I Corinthiens 14:26 :

« Que faire donc, frères? Lorsque vous vous assemblez, les uns ou les autres parmi vous ont-ils un cantique, une instruction, une révélation, une langue, une interprétation, que tout se fasse pour l’édification. »

Hébreux 10:24,25 décrit aussi de façon indiscutable::

« Veillons les uns sur les autres, pour nous exciter à la charité et aux bonnes oeuvres.

N’abandonnons pas notre assemblée, comme c’est la coutume de quelques-uns;

mais exhortons-nous réciproquement, et cela d’autant plus que vous voyez s’approcher le jour. »

( Voir aussi I Thessaloniciens 5:11 et Hébreux 3:13-14)

La réunion visualisée dans les Écritures était destinée a conduire chaque membre de l’assemblée locale à participer à la construction de l’église en tant que Corps

(Ephésiens. 4:16).

Dans le Nouveau Testament, l’interdépendance était le sceau, la marque de reconnaissance de la rencontre –« chacun d’entre vous » en était la caractéristique la plus frappante.

Bien qu’il y eut des chants et des louanges d’interprétés, cela n’était pas confiné à une équipe spéciale dirigeante de musiciens professionnels chargée exclusivement de conduire l’assemblée dans la louange. La réunion était plutôt ouverte à conduire « chacune des personnes présentes » à « exercer un ministère » à travers le chant.

Les mots de Paul sont (I Corinthiens 14:26):

« les uns ou les autres parmi vous ont-ils un cantique » dans l’assemblée locale.

Même les chants en eux-même étaient marqués du sceau de l’interdépendance, en ce sens que Paul exhorte les frères et soeurs à « s’entretenir les uns les autres par des psaumes, par des hymnes, et par des cantiques spirituels, chantant et célébrant de tout votre coeur les louanges du Seigneur

(Ephésiens. 5:19, Col. 3:16) ».

Dans un tel contexte d’ouverture, il est raisonnable de supposer que les premiers chrétiens composaient leurs propres cantiques et les partageaient avec le reste des saints durant la rencontre.

De plus, chaque croyant de l’assemblée qui recevait une parole de Dieu se voyait donner la liberté de l’apporter avec ses propres dons spirituels particuliers.

Donc, une rencontre « primitive » typique se serait déroulé ainsi :

– un enfant partage la Parole de Dieu à travers une pièce dramatique et un chant;

– une jeune femme donne son témoignage;

– un jeune frère partage une exhortation suivie d’une discussion de groupe;

– un frère plus ancien explique une partie des Écritures suivi d’une prière ;

– une soeur raconte une histoire tirée de ses propres expériences spirituelles;

– plusieurs adolescents discutent de leur semaine de classe et exposent leurs requêtes de prière;

…et tous ensemble vivent un moment de communion fraternelle en partageant un repas à la même table.

 

Lorsque l’apôtre fait le tableau de la réunion du Nouveau Testament dans I Corinthiens 14, nous voyons une rencontre où chaque membre est activement impliqué.

Fraîcheur, ouverture, et spontanéité étaient les marques de fabrique de ces rassemblements, et l’édification mutuelle en était le but premier.

Les instructions bibliques concernant la réunion de l’église primitive sont définies solidement dans les Ecritures et reposent sur la direction de Christ (en tant que la Tête du Corps), qui est le point central du dessein éternel de Dieu (Ephesiens 1:9-22, Col. 1:16-18).

Cela revient à dire que Christ était entièrement prééminent dans le rassemblement des croyants du Nouveau Testament. Il en était le centre et la circonférence. Il tenait « l’agenda », Il dirigeait les évènements, et Il était « le boss » indiscuté. Bien que Sa direction soit invisible à l’oeil nu, Christ était clairement le Guide.

Dans ce contexte, le Seigneur Jésus était libre de parler à travers celui qu’Il choisissait et cela quelles que soient ses capacités.

En contraste, la pratique commune d’une infime partie de ministères professionnels assumant toutes les activités de l’assemblée, alors que le reste des saints demeurent passifs, était absolument étrangère aux premiers croyants.

 

Conclusion : ce mouvement de retour à la Parole est une vraie tendance de fond, les églises qui suivent ce modèle se retrouvent maintenant  sur tout les continents.

Les fruits sont bien présents et les membres croissent en Christ à une vitesse fulgurante par rapport aux églises évangéliques traditionnelles.

Il y a très peu de départs.

Qui a dit que la réforme était compliquée ?

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